Situons d'abord l'endroit!…
Le Pays Valencien, région autonome dont la langue officielle est le "Valencien", dérivé du Catalan, fait 300 km de long et se partage en trois "Provincias" (c'est ainsi qu'on nomme les départements en Espagne) : au nord, la Province de Castellón, au milieu, celle de Valence et au sud, la Province d'Alicante où je passe mes vacances d'été pratiquement depuis ma naissance…
Ma grand-mère maternelle est née dans un petit village nommé Polop de la Marina, que les slogans publicitaires de l'office de tourisme local désignent à juste titre comme l'Oasis de la Costa Blanca. En effet, alors que, plus au sud, les environs d'Alicante paraissent semi désertiques, la région de Polop, appelée "Marina Baixa" (prononcer "Baïcha") est très verte... C'est parce qu'elle est entourée de montagnes, formant un réceptacle pour l'eau, qui irrigue ensuite généreusement toute la région. Et ce ne sont pas des "montagnettes"! Le point culminant, situé à une vingtaine de kilomètres de la mer à vol d'oiseau, est l'Aitana, 1557 m d'altitude. Plus près de mon lieu de vacances, plusieurs sommets forment un décor grandiose, tous visibles depuis ma maison. Je vous fais un tour d'horizon : le Puig (dire "Pouche") Campana, 1408 m, Le Monte Ponoig (Ponotche), 1181 m, la Sierra de Bernia, 1128 m, et la plus petite mais non la moins impressionnante, la Sierra Helada, 437 m seulement, mais formant une falaise qui surplombe la mer.
VTT ou… BTT, comme on dit en Espagne!
Depuis près de 20 ans, j'escalade ces montagnes en VTT (ou BTT = "bicicleta todo terreno"), en partant quasiment du niveau de la mer. L'altitude la plus élevée que j'ai atteinte sur ma bicicleta de montaña avoisine les 1400 m. C'était sur les pentes de l'Aitana.
Sur les chemins et sentiers qui sillonnent ces montagnes, les pourcentages de pente peuvent être effrayants, pouvant dépasser les 20% sur plusieurs centaines de mètres.
De plus, lesdits chemins sont très secs et très accidentés de sorte qu'on dérape facilement. Pour limiter ce risque, il ne faut pas avoir des pneus trop gonflés et savoir grimper en souplesse. En hiver, les pluies torrentielles creusent par ailleurs sur ces chemins en pente de profondes ornières, dont le franchissement en cours d'escalade pose toujours des problèmes. Grimper sur les pentes de ces montagnes reste donc toujours un défi… Et chaque année, j'essaye d'explorer de nouvelles voies...
Balade d'exploration tout terrain…
En ce 30 juillet 2009, je suis parti vers 18h (plus tôt, il fait encore trop chaud sous ces latitudes !) avec l'intention de faire le tour du "Campana" et du "Ponoig" à la recherche d'un passage encore inconnu… Estimant avoir une cinquantaine de kilomètres à parcourir, j'ai pris la précaution d'emporter un dispositif d'éclairage avant et arrière, on ne sait jamais… J'ai fait les 20 premiers kilomètres par la route pour aller plus vite sur le site à explorer et puis je me suis mis en quête d'un chemin que j'avais déjà emprunté quelques années plus tôt et qui devait me permettre d'accéder à la zone de recherches…
La progression du goudronnage des anciens chemins a malheureusement perturbé tous les repères que j'avais en mémoire ! J'ai eu beau tester 5 ou 6 sentiers semblant partir dans la bonne direction, je suis toujours tombé sur des culs de sac et je n'ai jamais trouvé le sentier que je cherchais !
Déjà 25 km au compteur et, à force de perdre du temps en explorations vaines, il est 20h à ma montre. Pour rentrer avant la nuit, qui surviendra vers 21h15, je décide de rebrousser chemin et de rentrer par la route… C'est alors que je repère un ancien chemin récemment goudronné que je n'ai pas encore testé… Le démon de la curiosité et de l'aventure me poussent à tenter cette dernière chance...
Cette nouvelle petite route, même si elle ne va pas dans la direction initialement recherchée, s'avère beaucoup plus longue que prévu. Elle finit par laisser place à un chemin très praticable et, de fil en aiguille, je me retrouve à quelques centaines de mètres (du moins, c'est ce que je crois !) du col qui franchit la montagne entre Ponoig et Campana : le "Coll del Pouet" (prononcer "Pohouette"), 883 m d'altitude…
Connaissant le versant opposé à celui où je me trouve, je sais qu'une fois atteint ce col, je n'aurai plus qu'à me laisser descendre jusqu'à la maison sur un peu plus de 10 km, dont 7 km d'un chemin présentant toutes les caractéristiques que j'ai décrites plus haut, à savoir pente, terrain piégeux avec ornières et gravillons, mais terrain connu ! Plus question de rebrousser chemin !
Plusieurs personnes m'ayant signalé un sentier pédestre dans ce secteur, information confirmée par la carte d'état major que j'utilise, je me mets à le chercher… Si je le trouve, il me faudra probablement pousser le vélo pendant un bon moment avant d'atteindre le col, mais tant pis ! Très vite, la chance se manifeste sous la forme d'un jeu de piste, comme dans ma jeunesse : au milieu de l'allée, une flèche formée de plusieurs branches signale l'amorce du sentier! Un large sourire exprime mon enthousiasme et ma détermination ! Je suis sur la bonne piste…
Atteindre le col ne sera pas de tout repos ! Le sentier est étroit et escarpé avec des épingles à cheveux et des obstacles à franchir… Ce n'est déjà pas facile à pied, alors en poussant un VTT!… Mais je me sens gonflé à bloc ! Je m'arrête à plusieurs reprises pour admirer le paysage, respirer les senteurs de pin et de romarin, photographier la Serra del Castellet au soleil couchant…
… et le coucher de soleil sur l'Aitana...
Je passe un petit coup de fil à mon fils Antonin, resté à la maison, pour lui dire que je ne rentrerai pas avant la nuit, mais que tout va bien... Fin de l'ascension, je regarde la montre : 21h15 ! La nuit ne devrait pas tarder... Autoportrait devant la pancarte marquant le col ! Je me désaltère, je savoure, euphorique, puis j'allume mes loupiotes... et je m'apprête à attaquer la descente de 10 km !
Je repars prudemment, je sens que mon cœur bat plus vite… Pourtant, dans la montée, tout à l'heure, il n'a pas ménagé sa peine ! Il faut croire que l'appréhension élève davantage que l'effort le rythme cardiaque ! Je freine en permanence car je n'ai pas assez de visibilité pour anticiper... Je vois les ornières au dernier moment ! Pas question de laisser ma monture prendre de la vitesse !
Les cinq cents premiers mètres offrent une pente à 15%. Les 500 m suivants sont les plus impressionnants de toute la descente : 22% de moyenne. Avec une telle pente, par moment, le vélo dérape et la tension monte encore d'un cran ! Je sais que si je freine davantage, je risque de ne plus maîtriser du tout le vélo et de me casser la gueule ! Je suis concentré au maximum, essayant de repérer la meilleure trajectoire… Enfin, la moins dangereuse : éviter les ornières, les gravillons, et les gros cailloux qui roulent (les Rolling Stones, pour les connaisseurs)…Parfois, il n'y a pas le choix, il y a les trois à la fois et rien de mieux à faire que juste essayer de ne pas se viander !
Deux ou trois fois dans la descente, la pente s'adoucit au point que j'ai l'impression d'être sur du plat ! Je lâche les freins... mais ce n'était qu'une illusion (je n'ose pas dire "d'optique" car je n'y vois vraiment pas grand chose !) et le vélo reprend tout de suite de la vitesse... Et attention aux gravillons ! Reprise de freinage... en douceur ! Surtout, ne pas bloquer les roues! Sinon, dérapage incontrôlable assuré!
Je commence à fatiguer ! De nuit, elle me paraît interminable cette descente ! Il est vrai qu'à la lumière du jour, je la descends sensiblement plus vite... Quand je sors enfin des nuages, je me sens un petit peu mieux. J'aperçois au loin, sur ma droite, les lumières de Benidorm et pratiquement devant moi, celles de L'Alfas del Pi où se trouve ma maison. Je tiens le bon bout ! La fin se passera sans incident majeur, à l'exception d'une petite frayeur due à un dérapage qui a failli me jeter au tapis, jolie façon de désigner ces foutues caillasses qui ont tenté de me faire perdre l'équilibre à un moment où j'avais cru pouvoir me relâcher un petit peu…
Je n'avais jamais eu l'occasion de faire du VTT de nuit ! C'est maintenant chose faite ! Même si je n'ai pas choisi pour cela le terrain le plus approprié ! En fait, vous l'avez compris, je n'ai rien choisi du tout ! Je ne regrette cette expérience pas car j'aime le côté "aventure" du VTT. Cependant, il faut que ça reste dans des limites raisonnables. Pour cette descente de nuit, c'était tout près de cette limite et j'ai ressenti, au sens propre, ce que signifie "avoir des sueurs froides". A l'arrivée, mon maillot était à tordre!
Concrètement, je ne déciderais pas à l'avance de me remettre dans ce genre de situation. Mais lorsque le hasard et l'esprit d'aventure m'y entraînent, j'avoue y trouver finalement beaucoup de satisfaction et d'excitation…
A bientôt peut-être pour de nouvelles aventures en VTT !
Claude
Le Coll del Pouet (883 m), entre le Puig Campana (1408 m)
et le Monte Ponoig (1181 m)
|
VTT ou… BTT, comme on dit en Espagne!
Depuis près de 20 ans, j'escalade ces montagnes en VTT (ou BTT = "bicicleta todo terreno"), en partant quasiment du niveau de la mer. L'altitude la plus élevée que j'ai atteinte sur ma bicicleta de montaña avoisine les 1400 m. C'était sur les pentes de l'Aitana.
Sur les chemins et sentiers qui sillonnent ces montagnes, les pourcentages de pente peuvent être effrayants, pouvant dépasser les 20% sur plusieurs centaines de mètres.
De plus, lesdits chemins sont très secs et très accidentés de sorte qu'on dérape facilement. Pour limiter ce risque, il ne faut pas avoir des pneus trop gonflés et savoir grimper en souplesse. En hiver, les pluies torrentielles creusent par ailleurs sur ces chemins en pente de profondes ornières, dont le franchissement en cours d'escalade pose toujours des problèmes. Grimper sur les pentes de ces montagnes reste donc toujours un défi… Et chaque année, j'essaye d'explorer de nouvelles voies...
Balade d'exploration tout terrain…
En ce 30 juillet 2009, je suis parti vers 18h (plus tôt, il fait encore trop chaud sous ces latitudes !) avec l'intention de faire le tour du "Campana" et du "Ponoig" à la recherche d'un passage encore inconnu… Estimant avoir une cinquantaine de kilomètres à parcourir, j'ai pris la précaution d'emporter un dispositif d'éclairage avant et arrière, on ne sait jamais… J'ai fait les 20 premiers kilomètres par la route pour aller plus vite sur le site à explorer et puis je me suis mis en quête d'un chemin que j'avais déjà emprunté quelques années plus tôt et qui devait me permettre d'accéder à la zone de recherches…
La progression du goudronnage des anciens chemins a malheureusement perturbé tous les repères que j'avais en mémoire ! J'ai eu beau tester 5 ou 6 sentiers semblant partir dans la bonne direction, je suis toujours tombé sur des culs de sac et je n'ai jamais trouvé le sentier que je cherchais !
Déjà 25 km au compteur et, à force de perdre du temps en explorations vaines, il est 20h à ma montre. Pour rentrer avant la nuit, qui surviendra vers 21h15, je décide de rebrousser chemin et de rentrer par la route… C'est alors que je repère un ancien chemin récemment goudronné que je n'ai pas encore testé… Le démon de la curiosité et de l'aventure me poussent à tenter cette dernière chance...
Cette nouvelle petite route, même si elle ne va pas dans la direction initialement recherchée, s'avère beaucoup plus longue que prévu. Elle finit par laisser place à un chemin très praticable et, de fil en aiguille, je me retrouve à quelques centaines de mètres (du moins, c'est ce que je crois !) du col qui franchit la montagne entre Ponoig et Campana : le "Coll del Pouet" (prononcer "Pohouette"), 883 m d'altitude…
Vue du Puig Campana pendant la montée par la petite route |
Connaissant le versant opposé à celui où je me trouve, je sais qu'une fois atteint ce col, je n'aurai plus qu'à me laisser descendre jusqu'à la maison sur un peu plus de 10 km, dont 7 km d'un chemin présentant toutes les caractéristiques que j'ai décrites plus haut, à savoir pente, terrain piégeux avec ornières et gravillons, mais terrain connu ! Plus question de rebrousser chemin !
Plusieurs personnes m'ayant signalé un sentier pédestre dans ce secteur, information confirmée par la carte d'état major que j'utilise, je me mets à le chercher… Si je le trouve, il me faudra probablement pousser le vélo pendant un bon moment avant d'atteindre le col, mais tant pis ! Très vite, la chance se manifeste sous la forme d'un jeu de piste, comme dans ma jeunesse : au milieu de l'allée, une flèche formée de plusieurs branches signale l'amorce du sentier! Un large sourire exprime mon enthousiasme et ma détermination ! Je suis sur la bonne piste…
Atteindre le col ne sera pas de tout repos ! Le sentier est étroit et escarpé avec des épingles à cheveux et des obstacles à franchir… Ce n'est déjà pas facile à pied, alors en poussant un VTT!… Mais je me sens gonflé à bloc ! Je m'arrête à plusieurs reprises pour admirer le paysage, respirer les senteurs de pin et de romarin, photographier la Serra del Castellet au soleil couchant…
Monte Castellet |
… et le coucher de soleil sur l'Aitana...
Au fond : Serra Aitana |
Je passe un petit coup de fil à mon fils Antonin, resté à la maison, pour lui dire que je ne rentrerai pas avant la nuit, mais que tout va bien... Fin de l'ascension, je regarde la montre : 21h15 ! La nuit ne devrait pas tarder... Autoportrait devant la pancarte marquant le col ! Je me désaltère, je savoure, euphorique, puis j'allume mes loupiotes... et je m'apprête à attaquer la descente de 10 km !
Et là, changement de conditions ! Je suis maintenant sur le versant est, à l'opposé du soleil couchant, et l'obscurité est soudain beaucoup plus dense. Mais le plus angoissant, c'est que de ce côté, je suis dans les nuages ! Ça, je ne m'y attendais pas du tout!
Descente de nuit!
Je commence à rouler, mais ma loupiote avant, que j'utilise pour la première fois, est mal orientée ! Elle n'éclaire rien. Je m'arrête, et j'essaye de mieux la régler… Ce n'est pas merveilleux, mais ça devrait aller! Je profite de l'arrêt pour refermer le col de mon maillot… C'est qu'il ferait presque froid tout d'un coup ! Et avec mon maillot trempé de sueur… Brrrr !
Descente de nuit!
Je commence à rouler, mais ma loupiote avant, que j'utilise pour la première fois, est mal orientée ! Elle n'éclaire rien. Je m'arrête, et j'essaye de mieux la régler… Ce n'est pas merveilleux, mais ça devrait aller! Je profite de l'arrêt pour refermer le col de mon maillot… C'est qu'il ferait presque froid tout d'un coup ! Et avec mon maillot trempé de sueur… Brrrr !
Je repars prudemment, je sens que mon cœur bat plus vite… Pourtant, dans la montée, tout à l'heure, il n'a pas ménagé sa peine ! Il faut croire que l'appréhension élève davantage que l'effort le rythme cardiaque ! Je freine en permanence car je n'ai pas assez de visibilité pour anticiper... Je vois les ornières au dernier moment ! Pas question de laisser ma monture prendre de la vitesse !
Les cinq cents premiers mètres offrent une pente à 15%. Les 500 m suivants sont les plus impressionnants de toute la descente : 22% de moyenne. Avec une telle pente, par moment, le vélo dérape et la tension monte encore d'un cran ! Je sais que si je freine davantage, je risque de ne plus maîtriser du tout le vélo et de me casser la gueule ! Je suis concentré au maximum, essayant de repérer la meilleure trajectoire… Enfin, la moins dangereuse : éviter les ornières, les gravillons, et les gros cailloux qui roulent (les Rolling Stones, pour les connaisseurs)…Parfois, il n'y a pas le choix, il y a les trois à la fois et rien de mieux à faire que juste essayer de ne pas se viander !
Le profil de la descente : 800 m de D- en 10 km! |
Deux ou trois fois dans la descente, la pente s'adoucit au point que j'ai l'impression d'être sur du plat ! Je lâche les freins... mais ce n'était qu'une illusion (je n'ose pas dire "d'optique" car je n'y vois vraiment pas grand chose !) et le vélo reprend tout de suite de la vitesse... Et attention aux gravillons ! Reprise de freinage... en douceur ! Surtout, ne pas bloquer les roues! Sinon, dérapage incontrôlable assuré!
Je commence à fatiguer ! De nuit, elle me paraît interminable cette descente ! Il est vrai qu'à la lumière du jour, je la descends sensiblement plus vite... Quand je sors enfin des nuages, je me sens un petit peu mieux. J'aperçois au loin, sur ma droite, les lumières de Benidorm et pratiquement devant moi, celles de L'Alfas del Pi où se trouve ma maison. Je tiens le bon bout ! La fin se passera sans incident majeur, à l'exception d'une petite frayeur due à un dérapage qui a failli me jeter au tapis, jolie façon de désigner ces foutues caillasses qui ont tenté de me faire perdre l'équilibre à un moment où j'avais cru pouvoir me relâcher un petit peu…
Je n'avais jamais eu l'occasion de faire du VTT de nuit ! C'est maintenant chose faite ! Même si je n'ai pas choisi pour cela le terrain le plus approprié ! En fait, vous l'avez compris, je n'ai rien choisi du tout ! Je ne regrette cette expérience pas car j'aime le côté "aventure" du VTT. Cependant, il faut que ça reste dans des limites raisonnables. Pour cette descente de nuit, c'était tout près de cette limite et j'ai ressenti, au sens propre, ce que signifie "avoir des sueurs froides". A l'arrivée, mon maillot était à tordre!
Concrètement, je ne déciderais pas à l'avance de me remettre dans ce genre de situation. Mais lorsque le hasard et l'esprit d'aventure m'y entraînent, j'avoue y trouver finalement beaucoup de satisfaction et d'excitation…
A bientôt peut-être pour de nouvelles aventures en VTT !
Claude
Photos personnelles
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire