jeudi 23 juillet 2020

LES VÉLOS DANS L'ŒUVRE D'ALEKOS FASSIANOS

Un peintre grec contemporain, Alekos Fassianos, a produit un grand nombre d'œuvres en rapport avec le vélo. Ses bicyclettes sont très stylisées. On en observe un bel échantillon sur cette œuvre de 1971, où l'on remarquera notamment le guidon de forme "papillon" et le rayonnage très serré des roues.

La dormition, 1971

Alekos ("Lekos", "Alecos" ou encore "Alexandre") Fassianos est né à Athènes en 1935. D'après Wikipedia, « il est reconnu internationalement pour ses tableaux figuratifs, représentant de manière mythologique le monde contemporain. »

Alekos Fassianos

Parmi ses œuvres de “mythologie contemporaine”, exposées dans de nombreux musées, on trouve une grande quantité de vélos. Il est logique que cette belle machine ait inspiré l'artiste puisqu'elle est, depuis son apparition, à l'origine d'innombrables exploits mythiques, propices au culte des héros!…

Homme à bicyclette, aquarelle

Vélo et mythologie

L'œuvre ci-dessous en est une excellente illustration. Elle représente en effet un athlète au front ceint d'une couronne de laurier, dans un style inspiré de l'art grec antique qui évoque l'olympisme des origines. Cependant, le vélo et le décor d'immeubles modernes ancrent la scène dans un univers contemporain.

Athlète au vélo

Sur la lithographie ci-dessous, datant de 1992 et publiée à l'occasion des Jeux Olympiques de Barcelone, la couronne de laurier, attribut symbolique du vainqueur antique, est cette fois brandie par le cycliste, dans un geste qui suggère une victoire arrachée de haute lutte!

Barcelone, 1992

Dans une aquarelle de 2003, le peintre continue de jouer avec les anachronismes en mêlant mythologie grecque antique et univers contemporain : il équipe ainsi d'une bicyclette le messager des dieux, Hermès. On reconnaît le dieu, connu sous le nom de Mercure chez les Romains, à des attributs tels que de petites ailes sur la tête, et un caducée tenu dans la main droite..

Hermès (2003)

Le lecteur observateur aura sans doute remarqué que des “colombes de la paix” apparaissent dans les trois œuvres ci-dessus… Chaque fois, on y relève aussi la présence symbolique d'une écharpe, tenue en main ou enroulée autour du poignet, qu'on peut voir comme une sorte de trophée. Enfin, les épis de blés, autre élément récurrent, y symbolisent la vie, la nourriture fondamentale, considérée comme un don des dieux dans l'antiquité.

Un cycliste au repos… dans un champ de blé!

La pratique cycliste

En dehors des athlètes "mythiques" observés ci-dessus, les cyclistes représentés par Fassianos ne ressemblent guère à des sportifs. On les voit souvent cheveux et foulard au vent. Leur corpulence et leur tenue vestimentaire les désigne plutôt comme des utilisateurs occasionnels.

Cycliste rouge

Deux œuvres jumelles, représentant vraisemblablement le même cycliste, évoquent les saisons. Dans la première, l'artiste a choisi des tons de gris pour symboliser l'hiver (huile sur toile et feuilles d'argent)…

Cycliste en hiver

… et des tons de jaune (ou d'ocre jaune) dans la seconde pour ce "cycliste au soleil" de l'été (huile sur toile et feuilles d'or). Outre les cheveux et le foulard, on y voit flotter une écharpe, un élément qu'on retrouvera souvent.

Cycliste au soleil

L'effort du cycliste est très rarement suggéré si ce n'est, peut-être, dans cette "huile sur toile", où l'artiste a choisi de mettre en relief la respiration. D'ordinaire peu perceptible, un souffle visible témoigne d'une activité physique plus intense…

Respiration

On retrouve la même thématique dans ce tableau de 2005, où le souffle du cycliste est toutefois moins visible.

Cycliste respirant

Sur une autre œuvre (acrylique sur toile), assez similaire dans sa construction, ce n'est plus l'air de la respiration qui sort de la bouche du cycliste, mais… la fumée d'une cigarette! Le “fumeur cycliste” est un thème qu'on retrouvera à de nombreuses reprises dans les œuvres de Fassianos…

Fumeur cycliste

Les “fumeurs cyclistes”

J'ignore pourquoi l'artiste a multiplié les œuvres sur ce thème, au point qu'on est en droit de se demander quelle signification il donne à cette association paradoxale.

Graphiquement, on peut y repérer une intéressante ébauche de symétrie entre les cheveux qui volent au vent dans une direction à peu près horizontale et la fumée qui s'échappe de la cigarette en sens opposé.

Fumeur cycliste, 1996

L'effet de symétrie “cheveux - fumée” se retrouve dans cette œuvre intitulée “L'homme à la bicyclette”…

L'homme à la bicyclette

Dans “En descendant la colline”, en 1969, cheveux et fumée occupent même une surface importante, voir envahissante, sur le tableau.

En descendant la colline, 1969

L'effet de symétrie se répète encore et encore, de sorte qu'il ne saurait être fortuit! Depuis l'homme en rouge…

« Le cycliste au papillon rouge », 1970

… à l'homme en bleu…

Fumeur cycliste

… en passant par l'homme en noir, même si l'effet de symétrie est ici moins flagrant.

Fumeur cycliste

En revanche, il n'y a pas de symétrie dans cette toile de 1966, où la fumée occupe une place dominante mais où l'on ne voit guère les cheveux. Sur la droite, il me semble identifier le double canon d'un fusil crachant ses plombs… Un chasseur de cyclistes?

Le cycliste fumeur, 1966

… et les cyclistes qui fument!

Curieusement, dans une huile sur toile de 1966, déclinée en deux teintes différentes, c'est le cycliste lui-même qui fume et non la cigarette!… S'agit-il d'une visualisation de la sueur en cours d'évaporation? Ou le cycliste a-t-il réellement pris feu?…

Voici une première version sur fond foncé avec fumée brune…

Cycliste qui fume 1

… et une version sur fond clair, avec fumée bleue…

Cycliste qui fume 2

Duos ou trios à bicyclette

Dans l'œuvre de Fassianos, on trouve peu de duos et encore moins de trios à bicyclette. En voici quelques exemples…

On voit ici deux cyclistes qui roulent ensemble. Le personnage central, encore un fumeur, arbore les attributs volants déjà observés : foulard, écharpe, cheveux et fumée de cigarette; on y observe aussi les symboliques épis de blé.

Les deux cyclistes

Dans l'œuvre ci-dessous, il s'agit d'un couple d'amoureux. Le titre, “Les amants du Pirée”, ne laisse planer aucun doute à ce sujet.

Les amants du Pirée, 1966

Cette maquette pour sérigraphie, datant de 1970, ne manque pas d'intriguer… Intitulée « tricycle », elle nous montre curieusement non pas un cycle à trois roues, mais trois cyclistes si proches les uns des autres qu'ils semblent juchés sur la même monture. Une définition pour le moins originale du tricycle!

Le tricycle, 1970

Cyclistes qui portent leur vélo

Un cycliste portant son vélo est une situation peu fréquente mais qui existe. Certains y sont contraints dans le cadre de leur pratique sportive, en cyclo-cross ou en VTT par exemple ; d'autres pour gravir ou descendre des escaliers. Mais Alekos Fassianos ne nous donne aucun éclairage sur les motivations de ses cyclistes "porteurs"…

Je porte ma bicyclette, 1995

L'indice fourni par le sol carrelé nous conduit néanmoins à éliminer les pratiques cyclistes tout-terrain, telles que cyclo-cross ou VTT…

Le vélo bleu, 1999

Hommages à Séféris

Pour mettre un terme à cet inventaire des thématiques abordées par l'artiste, voici deux œuvres intitulées “Hommage à Séféris”… Il s'agit du diplomate et poète grec Georges Séféris, prix Nobel de littérature en 1963.

Hommage à Séféris

J'imagine que le grand poète grec devait être un utilisateur de bicyclette, et peut-être un pratiquant sportif. Sinon, je ne vois pas pourquoi Alekos Fassianos aurait choisi de l'associer à un vélo pour lui rendre hommage… Néanmoins, je n'ai pas trouvé la confirmation de cette hypothèse.

Hommage à Séféris

Techniques variées

Pour créer ses œuvres consacrées au vélo, Fassianos a eu recours à diverses techniques : peinture, aquarelle, gravure, lithographie, et même sculpture…

Statue en bronze représentant un cycliste (Athènes)

Dans ses tableaux et lithographies, la couleur est souvent appliquée uniformément, en utilisant une seule teinte, comme pour ces deux cyclistes rouges.

Deux cyclistes

Certaines œuvres, à dominante noire ou grise, présentent un véritable effet de silhouette… On remarquera ici qu'un des deux personnages, vraisemblablement féminin, fume la pipe… Toujours cette étrange association vélo et tabac!

Bi-cyclistes, 1965 (Musée de Rhodes)

Les silhouettes ci-dessous montrent également une personne qui fume, mais cette fois il s'agit d'une cigarette…

Cyclistes en silhouettes

Toujours assez proche de la silhouette, cette “personne rouge” a toutefois des traits qui ressortent davantage grâce à des teintes claires qui accentuent le relief, notamment du visage et de la main droite… On note que le foulard est particulièrement soigné.

Personne rouge

Pour certaines œuvres, un effet de "gravure" est rendu par la technique utilisé : la lithographie. 

Cycliste, 1972

Pour d'autres œuvres, l'artiste obtient un effet comparable en appliquant de larges aplats de couleurs uniformes, puis en soulignant les détails à l'aide d'un pinceau fin. Souvent quelques détails ajoutent des touches de couleur différente, par exemple ici : foulard, sol carrelé…

Œuvre sans titre, 1970

La palette de Fassianos privilégie quelques couleurs de base : bleu, rouge, ocre jaune… Pour ses œuvres avec des vélos, on remarque plus particulièrement l'emploi de toutes sortes de bleus, du plus vif au plus pâle…

Le cycliste bleu

… ainsi que le rouge vermillon.

Lithographie, octobre 1992

Le cycliste au miroir, lithographie

On a pu voir aussi, au fil de cet article, des œuvres utilisant le vert profond (Hommage à Séféris), l’ocre jaune, ou encore l’or et l’argent (Été / Hiver), etc.


Personnage blanc sur fond coloré

Dans quelques exemples, c'est le fond qui est vivement coloré. Sur ce fond se détache un personnage en blanc.

Homme au vélo

Avec un fond plus réaliste, voici un autre cycliste blanc.

Le cycliste

Ce “jeune homme à la bicyclette”, en blanc sur fond rouge, se distingue quant à lui par une pratique très curieuse de la bicyclette… Le vélo est-il en lévitation? Ou s'agit-il d'une représentation de l'expression bien connue des cyclistes : « Il a raccroché le vélo »?…

Jeune homme à la bicyclette

Conclusion

Pour conclure, je mentionnerai un livre signé par le peintre, qui s'intitule “Le mythe à bicyclette”. J'en ignore le contenu.

Le mythe à bicyclette

Curieusement, on ne voit pas de bicyclette en couverture… mais l'épi de blé symbolique est bien présent! Un symbole de vie et de vitalité pour tous les cyclistes, mythiques comme modestes!

Claude
Illustrations trouvées sur Internet

LIENS :

➜ Page Wikipedia : Alekos Fassianos

BONUS :


➜ Inventaire de tous mes articles sur le thème : Vélo et culture

dimanche 5 juillet 2020

DE PINSAC AU MONT SAINT-JOSEPH (LOT)

Les balades à vélo “à la journée” redémarrent très fort!

Tous les ingrédients étaient réunis ce dimanche 5 juillet 2020, à Pinsac, dans le Lot, pour une belle reprise des sorties à la journée : l'ambiance chaleureuse des retrouvailles, l'accueil de la famille Maroselli, une météo idéale, un parcours du jour haut en couleurs et en grimpettes.

Couleurs d'été sur Rocamadour (photo Michel P.)

Pour cette reprise exigeante (86 km et 1300 m de dénivelé), nous étions sept à prendre le départ à Pinsac  (lieu de départ et d'arrivée) sous le coup des 9h30 (les 3 "Michel", Pierre, Lou Bob, Claude et moi-même).

Pierre, Bob, Michel, Claude, Michel L. et Marie-Ange (photos Michel P.)

L'itinéraire a débuté par le passage d'une rive à l'autre de la Dordogne sur le pont de la Treyne.

La Dordogne vue depuis le pont de la Treyne

L'ouvrage métallique qui enjambe la Dordogne fait actuellement l'objet d'une remise en peinture.

Pont de la Treyne en travaux

Nos premiers tours de pédale (Michel P. ignore encore à ce stade de la balade qu'il va finir par perdre les siennes!) nous mènent au pied du château de Belcastel (commune de Lacave). Cet imposant monument, en surplomb sur une falaise, au confluent de la Dordogne et de l'Ouysse, a servi de décor à plusieurs scènes du film de Georges Lautner, "Quelques messieurs trop tranquilles". Une pause photo s'impose. 

Château de Belcastel

Le trio des Michel explose, l'un d'eux boudant cet arrêt pour aller vivre sa vie, cavalier seul sur sa monture à assistance électrique!
Mais dès le début de la montée en direction de Rocamadour, notre ami Bob est victime d'une crevaison. Premier contretemps de la saison une, épisode un sur trois (à suivre)!

A la fin de la montée, qui a éparpillé les troupes, le regroupement s'opère devant l'entrée du musée de la Grotte des Carbonnières et du “Préhisto Dino Parc”.

Squelette de tyrannosaure

La halte suivante a lieu au hameau de l'Hospitalet, avec une vue imprenable sur la cité religieuse de Rocamadour. C'est là que nous avons retrouvé notre Michel "échappé", lequel profitant de son avance sur le grupetto, nous attendait sagement assis à l'ombre des arbres. 

Rocamadour depuis L'Hospitalet

L'équipe reconstituée, nous avons choisi de ne point nous attarder et avons pris la direction de Gramat. Après la descente, nous traversons l'Ouysse. La remontée vers le Causse nous offre des vues différentes sur Rocamadour.

Rocamadour

Au sommet de la côte de Rocamadour, sur le bord de la route, un paparazzi nous guettait! Marie-Louis était venu à notre rencontre afin de partager la suite des réjouissances en notre compagnie. Sur le Causse, entre Rocamadour et Gramat,  nous avons pris le temps d'admirer une chapelle près du château de la Pannonie.

La Pannonie (photo Internet)

Les secondes passant, les minutes s'écoulant, les heures s'égrenant, et parfaitement conscients que nous étions en retard sur le timing, nous n'avons fait que traverser Gramat, pressés que nous étions de regagner Aynac, mais en prenant soin tout de même de  lever le nez du guidon et de tourner nos regards vers le Château de Saignes que nous laissions derrière nous.

Château de Saignes

C'est à partir d'Aynac, sur la petite route qui grimpe au Mont Saint-Joseph, que les choses ont commencé à se gâter pour moi. Il était plus de treize heures, la faim me tenaillait, la chaleur s'était invitée, la pente était très raide et mes jambes ne répondaient plus. J'ai dû mettre deux fois pied à terre avant d'atteindre le haut du rampaillou, accueillie par les sourires et la bonne humeur de Viviane et d'Henriette qui étaient venues nous rejoindre en voiture! Prévoyantes et prévenantes, elles avaient apporté le stock de boissons fraîches. Qu'elles en soient mille fois remerciées! C'est au pied de la chapelle du Mont Saint-Joseph (commune de Saint-Jean Lagineste) que nous avons reconstitué nos réserves de glycogène tout en veillant à bien respecter les consignes de distanciation physique!

Pique-nique au Mont Saint-Joseph

Claude a même profité  d'un muret à l'ombre pour faire une micro-sieste. La deuxième partie du parcours nous attendait... avec son lot de pépins! Michel P. fut le premier à subir un ennui mécanique en cassant une pédale. Pendant qu'il tentait une réparation sur son pédalier, un rhinocéros volant le surveillait!

Rhinocéros

Mais il fallut se rendre à l'évidence: la randonneuse avait besoin d'un remorquage!  La seule solution fut de prévenir Viviane, pilote de la voiture d'assistance de l'équipe, qui embarqua le cyclo contraint à l'abandon ainsi que son vélo. Je précise "de l'équipe" car comme nous allons le voir plus loin, le véhicule d'assistance allait encore servir!

Pierre me dit alors : "Jamais deux sans trois"! Et pour lui donner raison, ce fut au tour de Claude d'essuyer une crevaison au moment de l'arrêt devant l'église de Padirac où nous venions de saluer Marie-Louis qui reprenait le chemin de Gramat. En cause : une maudite punaise sur le parvis de l'église Saint-Julien dont nous venions d'admirer la magnifique charpente en bois en forme de voûte arrondie ! Incident mineur vite pris en main par Claude, avec l'aide de Bob.

Eglise de Padirac (photo Internet)

Ce fut à partir de Miers que les forces commencèrent à m'abandonner. Un jour "sans" malgré la protection de tous ces saints! Mais encouragée par mes compagnons de route, je décidais de m'accrocher coûte que coûte. Nous finîmes par retrouver la Dordogne entre Meyronne et Saint-Sozy.

La Dordogne entre Meyronne et Saint-Sozy

Mais restait encore à franchir la colline entre Saint-Sozy et Pinsac. Une montée d'environ 4 km avant de basculer sur Pinsac. Fatiguée, je décidais d'abandonner et de monter à mon tour dans le véhicule d'assistance. Michel et Viviane eurent la délicatesse de me conduire au sommet de cette ultime bosse où j'attendis avec eux l'arrivée des copains avant de replonger sur Pinsac en leur compagnie.

Pierre et Claude à leur arrivée au sommet de la dernière côte (photo Michel P.)

A notre arrivée, nos hôtes nous ont généreusement offert rafraîchissements et gourmandises, qui furent les bienvenus! Un grand merci à Marylène et à Pierre! Sans oublier nos compagnons de route de cette journée mouvementée!

Marie-Ange
Photos de Claude, sauf mention contraire (Michel P. ou Internet)